la patience est une vertu qui fait dormir ━ pv

Nombre de choses s'étaient passées depuis l'épisode de l'arène. Ryan avait vu, avec un brin d'étonnement, quelques couples se former autour de lui des suites de cet événement : Jamshid était désormais auprès de Cassidy, Esteban ne quittait plus du regard la belle Athena et même Artemis agissait de façon assez étrange quand il était question d'Erwan ou de sa famille. Quant à lui, Ryan avait du dire adieu à un ami : on avait proposé à Hina de partir en retraite fermée afin d'apprendre à maîtriser cette créature en lui qui était en train de le consumer de l'intérieur. Personne n'avait envie qu'Hina ne meurt : tout le monde l'encouragea à partir et c'est ce qu'il fit. On prévint bien Ryan qu'il y avait de grands risques que ce voyage dure de longues années : le blond lui fit promettre de ne pas l'attendre si, au détour d'une rencontre, l'amour naissait plus brillant que jamais. Bien sûr, il ressentit beaucoup de peine de devoir dire au revoir au garçon qui avait meublé tant de jours dans sa vie, mais Ryan était aussi rassuré de savoir qu'Hina était entre bonnes mains et qu'il allait pouvoir affronter le monde un peu plus sereinement désormais.

Même si ses amis étaient obnubilés par l'amour, Ryan n'en était pas jaloux. Il avait encore beaucoup de choses à accomplir : il était, après tout, un garde royal précieux et un homme qui ne tolérait pas de se ramollir. Après avoir passé si près de remporter ce combat d'arène, le jeune homme s'était promit de continuer l'entraînement et de devenir meilleur. Il ne pouvait pas ralentir alors que le monde semblait plus menaçant que jamais. Cela n'enlevait toutefois rien au fait qu'il se traînait quelques blessures qui, en raison de son entêtement à combattre et à faire d'importants efforts physiques, ne voulaient pas se refermer aussi bien qu'elles auraient dû. Ryan avait promit de passer à l'hôpital régulièrement pour faire changer ses bandages et vérifier l'état de sa santé.
À l'entrée, on lui donna un numéro et Ryan alla s'installer sur l'une des chaises de la salle d'attente, l'air aussi blasé qu'à son habitude. D'ailleurs, c'est après quelques heures à être assit dans cet environnement barbant que le soldat s'endormit enfin. Il était là à roupiller, les bras croisés contre le torse, installé contre sa chaise les jambes étalées devant lui. Les yeux clos, il paraissait presque être une statue, ne faisant aucun bruit ni n'embêtant personne si ce n'est ceux qui devaient passer dans l'allée et qui ne souhaitaient pas se prendre les pieds dans les siens et tomber à la renverse.

Ryan avait toujours son billet dans la main, celui-ci bougeant de temps à autres quand un employé trop pressé passait en coup de vent.

Ryan était reconnu pour être à l'aise avec l'idée de dormir même dans les endroits les plus improbables : il fallait dire que les efforts considérables qu'il mettait dans son entraînement chaque jour faisait de lui une victime idéale de Morphée. Sachant très bien qu'il devrait peut-être patienter des lustres dans une salle d'urgence bondée, le jeune homme n'avait pas pensé une seule seconde qu'on finirait par choisir son dossier qui, en comparaison d'un enfant malade ou de quelqu'un s'ayant cassé le bras, n'avait rien de particulièrement urgent. Alors quand, des profondeurs de ses rêves, une voix teinta à ses oreilles, il songea momentanément que son esprit lui jouait des tours. Il était, après tout, seul dans une grande forêt où sa seule compagne était la brise d'été. Mais lorsque le sol se mit à trembler sous ses pieds et qu'il eut l'impression assez nette qu'on l'agrippait par les épaules, Ryan finit par se réveiller d'un sursaut, les yeux rivés sur celui qui se tenait devant lui en lui hurlant dessus les lettres qui composaient manifestement son prénom.

« ... Quoi ? » lâcha-t-il, d'abord, la bouche pâteuse, un filet de bave encore tiède sur le coin de la bouche. Puis, spontanément, il répéta : « QUOI ?!! » avec la même force de hurlement que le jeune médecin en face de lui. Il est vrai que nombre de gens se moquèrent de lui. Sans doute jugeaient-ils aussi burlesque qu'inapproprié que quelqu'un s'endorme là en risquant de rater son tour sachant combien de temps ils devaient, en moyenne, attendre qu'un médecin les appelle. « C'est toi qui viens chercher les patients ? » demanda-t-il finalement, les sourcils froncés, persuadé que ce nain de jardin ne pouvait être qu'un stagiaire un peu trop enthousiaste.

« Depuis combien de temps je dors ? » demanda ensuite Ryan de son air blasé à la vieille dame assise juste à côté de lui. La grand-mère relâcha son sac à main dans lequel elle fouillait et posa un regard assez sérieux sur son interlocuteur. Elle lui répondit d'une voix grinçante et sèche un : « Depuis aussi longtemps que je suis ici, jeune homme. Même moi, une vieille femme de 86 ans, semble avoir une meilleure ouïe que vous. Pauvre garçon, vous feriez mieux de suivre le docteur Tomomi avant que votre cas ne s'aggrave. » Elle leva le nez d'un air arrogant et Ryan sembla momentanément choqué qu'une vieille dame se soit adressé à lui avec autant d'arrogance. Il mit, d'ailleurs, une petite distance entre elle et lui et détourna le regard pour reporter son attention sur le dénommé Tomomi.

« Ok... on va où ? » demanda-t-il à nouveau de sa voix traînante, se levant de sa chaise en enfonçant immédiatement les mains dans les poches de son blouson, dépassant d'au moins deux têtes le blondinet angélique qui était venu le chercher d'on ne sait où.